La formation des enseignants à/dans une perspective actionnelle

La perspective actionnelle a été élaborée ces dix dernières années pour l'enseignement-apprentissage des langues-cultures. Il est devenu nécessaire d'en définir les implications dans la formation des enseignants.


Il me semble que l'on doit distinguer la formation des enseignants

 

- à la perspective actionnelle : on leur en présente ou fait rechercher les origines, les principes, les formes de mise en oeuvre dans les manuels de langue et les séquences de classe; on leur fait créer des outils et des séquences correspondants, etc.);

 

- et dans une perspective actionnelle : dans ce dernier cas, les principes de la perspective actionnelle sont appliqués à la conception de la formation elle-même des enseignants.


Concevoir la formation des enseignants dans une perspective actionnelle doit se faire au moins à deux niveaux:


1) Le niveau des modes de formation des enseignants


Le moyen le plus efficace de former les enseignants est sûrement qu'ils se mettent eux-mêmes "dans une perspective actionnelle" vis-à-vis de leur formation, c'est-à-dire qu'ils la conçoivent avec les formateurs comme un projet global à la fois personnel et collectif et qu'ils la réalisent en partie - sinon pour l'essentiel - sous forme de projets concrets négociés avec les formateurs.


2) Le niveau des contenus de formation des enseignants


Je viens de relire, à l'occasion de la préparation d'une prochaine conférence, le Dossier d’actualité Veille et Analyses, n°79, novembre de l'IFE intitulé "Pédagogie + Numérique = Apprentissages 2.0", réalisé par Rémi THIBERT et publié en ligne en 2012. Il y rendait compte en ces termes de l'initiative de l'European Schoolnet avec "la classe du futur".


Le Future Classroom Lab, mis au point dans le cadre du projet iTEC (Designing the future classroom), part du postulat que ce n’est pas tant le numérique qui conditionne l’espace que l’utilisation pédagogique qui en est fait. La classe telle qu’ils l’imaginent (au jour d’aujourd’hui, avec les outils d’aujourd’hui) comporte six zones d’apprentissage, correspondant à six situations d’apprentissage :

- Une zone de recherche et d’accès aux ressources (textes, images, vidéos, son, etc.) ;

- Une zone de création pour la réalisation de projets ;

- Une zone de présentation avec interactivité, audience, etc. ;

- Une zone d’échange et de collaboration ;

- Une zone d’interactions entre l’enseignant et les élèves ;

- Une zone de développement plus personnel (apprentissage informel, recherches individuelles, etc.). (p. 11/22)


Il se trouve que ces situations d'apprentissage sont définies "dans une perspective actionnelle" (i.e. en fonction de ce qu'y font les apprenants), et elles correspondent aussi par conséquent à une typologie très concrète des activités fondamentales d'apprentissage... et de formation (on peut proposer les mêmes types de "zones" différentes aux étudiants en formation ).

 

Il faudrait sans doute compléter les contenus, comme nous y invitent d'ailleurs les différents "etc." à la fin de plusieurs items. Je ne vois pas, par exemple, pourquoi le "développement plus personnel" ne se ferait pas aussi en partie pour l'apprentissage de la langue dans des apprentissages formels, par exemple au moyen d'exercices portant sur la grammaire et le lexique, ou encore par un entraînement individuel à des stratégies de compréhension. Mais ces différents types d'activités me semblent a priori permettre d'imaginer autant de "modules actionnels" de formation d'enseignants, qui auraient l'avantage décisif de jouer pleinement l'homologie entre les modes de formation et les modes d'enseignement auxquels on se propose de former.


Christian Puren